Région Nouvelle-Aquitaine : L’application de la loi sur le “zéro artificialisation nette” (ZAN) met Alain Rousset face à ses contradictions
À l’occasion de la séance plénière du Conseil régional des 11 et 12 mars, les modalités d’application du ZAN seront à l’ordre du jour, avec notamment un scénario de répartition entre l’État et la Région de quotas d’artificialisation. Les élu·es écologistes voient pointer des contradictions et de nouvelles brutalisations des territoires, avec le soutien de projets dépassés. Ces projets risquent, dans un avenir proche, de mettre en concurrence territoires et échelons administratifs (État, Région, Intercommunalités, Communes). D’autant qu’un grand flou apparaît sur les surfaces d’artificialisation retenues, notamment pour le projet « d’envergure nationale » de LGV GPSO.
Les territoires pourraient à l’arrivée payer ce flou au prix fort. Quant à Alain Rousset, qui prétend depuis des années que le GPSO va faire disparaître le « mur de camions » au sud de Bordeaux, il acte à ce stade l’élargissement de l’A63 à 2×3 voies, qui va décupler le flux routier. C’est totalement contradictoire.
Les écologistes pensent urgent de changer d’optique et de proposer une nouvelle vision du monde, à la hauteur des enjeux d’aménagement équilibré et résilient du territoire, de lutte contre le dérèglement climatique et de préservation de la biodiversité.
Le Conseil régional prendra connaissance, ce lundi, du scénario proposé à ce jour pour appliquer le « zéro artificialisation nette des sols » à l’horizon 2031, prévu par la loi « Climat et résilience » (modifiée en juillet 2023). La consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF) due à des « projets d’envergure nationale ou européenne présentant un intérêt général majeur » doit, en principe, être désormais comptabilisée au niveau national et non au niveau régional ou local.
Le Ministre de la transition écologique a proposé que le Grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) – construction de deux nouvelles lignes à grande vitesse (LGV) Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax – fasse partie de ces projets. « Mais il est ahurissant qu’une consommation de seulement 700 hectares (dont 469 ha pour la Nouvelle-Aquitaine et 231 ha pour l’Occitanie) soit prévue entre 2021 et 2031, s’étonne Christine Seguinau, coprésidente du groupe écologiste, solidaire et citoyen. Rappelons le, dans nombre de documents officiels, l’emprise de ce projet est chiffrée à 4800 hectares de terres agricoles, forêts et zones humides ! »
Dans un courrier joint à la délibération, et alors même qu’il avance depuis des mois, publiquement, le chiffre de 700 ha d’artificialisation pour GPSO, Alain Rousset demande pourtant que l’État précise si ce chiffre comprend bien tous les aménagements directement liés au projet (plateforme ferroviaire, gares et haltes nouvelles, sous-stations électriques, ouvrages de franchissements, talus, etc.) et les 22 ha des Aménagements ferroviaires au Sud de Bordeaux (AFSB) qui seraient exclus à ce stade.
« Pour ce projet dont il est le fervent défenseur, Alain Rousset n’assume pas que l’artificialisation induite, qui est colossale, soit intégrée dans la part régionale, souligne la conseillère régionale de Gironde Émilie Sarrazin. Dans le même temps, il l’assume pour la mise à 2×3 voies de l’A63 en Gironde. Pourtant, l’argument phare d’Alain Rousset pour promouvoir le GPSO est celui de développer le fret ferroviaire sur la façade atlantique, de faire sauter le « mur de camions » de marchandises qui transitent quotidiennement sur la nationale 10 et l’autoroute A63 générant des nuisances importantes : émissions de gaz à effet de serre, pollution atmosphérique et congestion en périphérie des zones urbaines. Donc, finalement, Alain Rousset fait les deux : le GPSO et le mur de camions avec l’A63 ! »
« L’autorité environnementale a émis de fortes réserves sur le GPSO, dont l’étude d’impact est obsolète, rappelle Christine Seguinau. Il y a déjà trois recours au tribunal administratif, un plan de financement bancal et la fronde des élus locaux et des habitants ne cesse d’enfler ; de nouveaux collectifs voient le jour, de nombreux élu·es se mobilisent, des citoyens refusent de payer la taxe (TSE)… et maintenant ce flou sur la question de la consommation foncière qui fait peser un risque de paralysie totale pour les besoins futurs des territoires de notre région. Car à qui les hectares manquants seront-ils imputés ? », demande-t-elle. « Il faut abandonner ce projet écocidaire qui, en plus d’être une gabegie d’argent public, va constituer un mur infranchissable en termes d’artificialisation, sauf à pénaliser toute la Région », conclut Émilie Sarrazin.